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Protopresbytre Alexis Kniazeff

Le père Alexis Kniazeff

Le protopresbytre Alexis Kniazeff est né le 16 avril 1913 à Bakou sur les bords de la mer Caspienne. La famille Kniazeff n’a quitté la Russie après la Révolution qu’en 1923. Ils se retrouvent tout d’abord à Nice, où il y avait déjà une grande colonie d’émigrés russes. Quand Alexis a commencé à entrer dans la vie de l’église, il y avait à la cathédrale Saint Nicolas une école paroissiale pour la catéchèse de la jeunesse. Il a pu assister aux offices présidés par l’archevêque Vladimir (Tichonicky), futur métropolite et exarque du Patriarcat œcuménique en Europe occidentale.

En 1924, la famille Kniazeff déménage à Neuilly-sur-Seine. Alexis termine ses études secondaires au lycée Pasteur de Neuilly et fait des études de droit à Paris. Diplômé en 1935, il entre dans une école de commerce et travaille jusqu’en 1938 dans une compagnie d’assurances. Mais cela ne correspond pas vraiment à ses aspirations véritables. En automne 1938, il décide de commencer des études de théologie à l’Institut Saint-Serge pour se consacrer définitivement au service de l’Eglise.

En 1942, Alexis Kniazeff est diplômé de l’Institut de Théologie Orthodoxe, qui était dirigé à ce moment-là par le père Serge Boulgakoff, professeur de théologie dogmatique. Souffrant d’un cancer de la gorge et quasiment privé de parole, le père Serge charge son élève Alexis Kniazeff de lire son cours aux étudiants en sa présence. Après la mort du père Serge en 1944, Alexis Kniazeff continue à enseigner cette matière en tant que lecteur.

Dans les années 40, sous l’influence du Professeur A. Kartachev , A. Kniazeff prend conscience d’une nouvelle vocation : l’Ancien Testament. Tout d’abord il enseigne une partie de cette matière et en 1950 devient titulaire de la chaire d’Ancien Testament et la garde jusqu’à la fin de sa vie.

En 1945, Alexis Kniazeff épouse Inna Valentinovna Sokoloff. Ils auront 4 enfants.

En 1947, Alexis Kniazeff est ordonné prêtre et est nommé à l’église de la Présentation-de-la-très Sainte-Mère-de-Dieu-au-Temple dans le XVe arrondissement de Paris. Il y reste jusqu’en 1952. De 1952 à 1965, il est le recteur de l’église St-Nicolas à Montmorency (Val d’Oise).

Il ne fait pas de doute que le père Alexis fut un maillon qui relia la génération des bâtisseurs de l’Institut aux générations suivantes. Il fut élève, successeur puis collègue du père Serge Boulgakoff, d’Antoine Vladimirovitch Kartachev. A l’automne 1959, le père Jean Meyendorff (ordonné la même année) part aux États-Unis, en 1960 décèdent l’archimandrite Cyprien (Kern) et le professeur Kartachev, le père Basile Zenkovsky meurt en 1962, Monseigneur Cassien en 1965 et le père Nicolas Afanassiev en 1966. Ces dates montrent qu’en un fort court laps de temps la première génération des professeurs nous a quittés. L’Institut, ses étudiants, les jeunes professeurs étaient comme orphelins.

Le père Alexis Kniazeff au camp de l'ACER dans les années 1960

En 1965 après le décès de l’évêque Cassien (Bezobrazoff), qui était recteur de l’I.T.O., c’est le père Alexis qui est élu et confirmé comme son successeur. De même il est nommé recteur de la paroisse Saint-Serge.

Il reçoit en 1965 le droit de porter la mitre et en 1975 il devient protopresbytre.

Avec foi et fermeté le père Alexis prend la direction, on peut dire le gouvernail, de l’Institut. Parmi les nouveaux professeurs qu’il a invités, il faut nommer Olivier Clément qui y a enseigné près de 30 ans, Constantin Andronikof, le successeur et le traducteur de pratiquement tout le corpus des œuvres du père Serge Boulgakoff. Très vite, apparut la nécessité de traduire l’enseignement en français et le père Alexis l’a fait, montrant par là sa sagesse et son courage, alors qu’il parlait plus librement le russe, sa langue maternelle Rapidement les professeurs se sont mis à la traduction, ce qui a sans aucun doute contribué à augmenter le rayonnement de l’Institut, tout du moins à Paris et en France.

« Je peux dire qu’à nos yeux, il incarnait un prophète, un prophète fougueux, proclamant la parole de Dieu avec feu et force. » (p. Boris Bobrinskoy)

A part l’Ancien Testament, qui reste le sujet le plus important de son enseignement, il donne des cours d’hagiologie. Le père Alexis enseigne également la mariologie, un sujet qui jusqu’alors n’avait jamais été enseigné dans les Académies de théologie. Avec sa formation de juriste, le père Alexis enseignait également le droit canon, que l’archevêque Georges (Wagner) souhaita enseigner par la suite.

Doté d’une formidable mémoire, le père Alexis consacrait toute son âme à une préparation consciencieuse de ses cours. Le début de son enseignement de l’Ancien Testament était surtout analytique : chapitre après chapitre, verset par verset. Mais avec le temps, son enseignement a évolué et il a cherché à donner une vision intégrale de tel ou tel livre dans son ensemble. Replaçant, comme il se doit, chaque livre dans son contexte historique, il se préoccupait de rendre visible la signification du livre en question pour le lecteur contemporain. Il n’oubliait jamais de rappeler son utilisation liturgique.

La créativité de la pensée du père Alexis s’est exprimée particulièrement dans la mariologie, enseignement qui étudie la Mère de Dieu ; dès le début de ses travaux il y consacre un certain nombre d’articles dans des revues russes et françaises avant de publier une analyse complète de ses recherches dans le livre « La Mère de Dieu dans l’Eglise Orthodoxe » (Paris, Editions du Cerf, 1990). Utilisant la méthode de la typologie, si proche des Pères de l’Eglise, il construit avec méthode et patience une nouvelle discipline dans l’enseignement théologique.

Outre son activité d’enseignant, après le décès de l’archimandrite Cyprien (Kern), le père Alexis avec la collaboration du père Pierre-Marie Guy, directeur de l’Institut Supérieur de Théologie liturgique, travaille activement à l’organisation et au déroulement de la « Semaine d’Etudes Liturgiques » qui chaque année se passe dans les locaux de l’I.T.O.

Le père Alexis, prêtre et professeur, était aussi un père spirituel. En plus de ses tâches paroissiales, il a mené pendant plus de 30 ans un travail considérable en tant qu’aumônier de la jeunesse dans les camps d’été de l’ACER dans les Alpes, venant tous les ans, vivant sous la tente, enseignant, célébrant les prières quotidiennes et les offices, prêchant tous les jours. Le père Alexis a marqué tous les adolescents et les adultes du Mouvement. Il ne ménageait pas ses forces, conduisait des pèlerinages comme à Notre-Dame de la Salette. Son énergie, les offices religieux qu’il célébrait ont inspiré beaucoup de jeunes et si un certain nombre de membres de l’ACER sont devenus prêtres, le père Alexis a joué sans aucun doute un rôle dans ces vocations. Le père Alexis a été vice-président de l’ACER de 1947 à 1975 ; il participait à tous les congrès de l’ACER.

Le père Alexis Kniazeff au camp de l'ACER en 1974

Dans le cadre de l’activité traditionnelle de l’Institut Saint-Serge, le père Alexis était très attentif au mouvement œcuménique ; il fut en particulier l’un des observateurs orthodoxes lors du concile Vatican II. Le père Alexis était un membre actif de beaucoup d’organisations œcuméniques se consacrant à l’étude de la Bible : l’Association Œcuménique pour la Recherche Biblique (AORB), L’Association Chrétienne Française pour l’Etude de la Bible (ACFEB ), la Bibliothèque œcuménique des études bibliques (BOSEV). Il a pris une part active à la traduction œcuménique de la Bible (TOB).

Docteur de l’Institut de Théologie Orthodoxe en 1954, il a aussi reçu le grade de docteur honoris causa de l’Académie de Théologie Saint-Vladimir de New York et de l’Institut de Théologie Orthodoxe de Préchov (Tchécoslovaquie). Il a reçu au cours de ses longues années de service beaucoup de distinctions honorifiques de différents patriarches : de Constantinople, d’Antioche, de Jérusalem ainsi que de l’Eglise de Finlande.

Parmi ses travaux, outre le recueil déjà cité consacré à la Mère de Dieu, il a écrit un livre sur l’I.T.O. (L’Institut Saint-Serge, de l’Académie d’autrefois au rayonnement d’aujourd’hui, 1924 -1975. Paris : Beauchesne, 1978). Il est difficile d’énumérer tous les articles qui ont paru dans divers périodiques, comme La Pensée Orthodoxe (éditions russe et française), «Le Messager Orthodoxe de l’ACER» (Paris), «Les questions liturgiques» (Louvain), «Les Cahiers Marials» (Paris); «Irénikon» (Chevetogne); «Bibliotheca Ephemerides Liturgicae» (Rome); «Edizioni Liturgiche» (Rome); «Les Nouvelles de Saint-Serge» (Paris). Il faut rappeler les cours ronéotypés du père Alexis : 4 tomes sur l’Ancien Testament, 1 tome sur l’hagiologie, 1 tome sur la mariologie et deux tomes de droit canon.

Son activité administrative dans la direction de l’Institut fut très efficace : c’est sur son initiative et avec l’aide des nombreux amis de l’Institut que fut construit le nouveau bâtiment pour l’hébergement des étudiants. De même, le père Alexis a contribué à la création d’un soutien financier à l’Institut. Il existait déjà auparavant, mais fut développé. Ce soutien a reçu le nom d’AMEITO (Association pour le maintien et l’entretien de l’Institut de Théologie Orthodoxe).

Le père Alexis Kniazeff fut aussi membre du conseil de l’Archevêché de 1966 à 1991.

Exigeant envers lui-même, il était aussi exigeant et sévère pour les étudiants, mais n’était jamais injuste. Il encourageait chaque jeune enseignant et étudiant pour son bien.

Travailleur infatigable jusqu’à son dernier souffle, le père Alexis Kniazeff fut rappelé à Dieu le 8 février 1991 après une brève maladie. Tous ceux qui le connaissaient garderont le souvenir d’un pasteur fidèle, d’un professeur consciencieux et d’un merveilleux prédicateur.